Balladur et l’ombre des kwasa en images

Reprise du focus paru dans le n°4 de Mwezi, le magazine d’AB Aviation. Un zoom sur Denis Balthazar,  artiste du Tout-Monde venu se recueillir sur les ombres de l’archipel. Connu pour être le co fondateur du Festival des Arts Contemporains des Comores (FACC), il rend ici hommage aux victimes du Visa Balladur.

Un scandale qui ne dit pas toujours son nom. L’archipel des Comores se réduit depuis 1995 à une « tragédie des migrations » Ds milliers d’hommes et de femmes qui sombrent à l’entrée d’une île, Mayotte, devenue territoire d’exception et cimetière, par la force d’une loi inique. Celle du Visa Balladur, qui, à la longue, sème le doute sur l’origine de la majeure partie des victimes. Sont-elles ou non des enfants de cette terre ravagée par des années d’occupation schizophrène ?

Cette histoire renoue avec le rêve imposé d’une puissance étrangère, qui, au fil des ans, a fini par détruire l’utopie même d’une terre-refuge. Par le passé, racontent les Anciens, ce pays sut accueillir. De partout, ils vinrent, poursuivis par leurs démons, faits d’ombres et de chaînes. Sur la rive, débarquant du bateau, on leur disait qu’ici s’entamait un récit nouveau, où l’être rendu à sa nudité première, ne pouvait recouvrir son humanité, pleinement, qu’encontribuant au bien commun.

Dans l’ordre des oeuvres : 4000 etc…/ The anger of those living under sheet metal/ I’m a legal alien/ The gaze of sheet metal/ Requiem pour une ballade (Denis Balthazar, technique mixte, 2006-2008).

Une histoire qui ne pouvait que séduire ce plasticien, Denis Balthazar, parti de sa lointaine Guyane, saisi sur les routes par les passions de cet archipel. D’une île à l’autre, il se fit, comme tout un chacun, son idée du legs, là où l’autre, figure d’éternel étranger, finit, à force de tisser du commun, par mériter une digne place. C’est ainsi que se racontent les légendes du pays, du moins. A Mayotte, où il se pose, les premiers jours, l’actualité s’est cependant montrée rude, avec ses milliers de refoulés et de trépassés à la Une.

Traversant cette ruche faite d’îles et d’espérances, Denis Balthazar interroge vite les alentours, jusqu’aux Mascareignes, en passant par les Afrique(s) proches, avant de se laisser surprendre à nouveau par la violence de ce quotidien, nourri au biberon du rejet et du déni de soi. Ces images font partie d’une série, à travers laquelle il constate la fureur et le désastre liés à la disparition des kwasa, dans un pays où le silence apaise, semble-t-il, les âmes de ceux qui errent, en ayant oublié ce qui les fonde.

Enfant du Tout-Monde, pris dans les rets de la mer indianocéane, Balthazar vit, aujourd’hui, entre Saint-Denis, Mamudzu et Mutsamudu.

Soeuf Elbadawi

Le numéro 4 de Mwezi dans lequel se trouve ce focus est téléchargeable ici : MWEZIMAG#04Il vous est gracieusement offert par la compagnie AB et ses partenaires. Le meilleur de la culture comorienne en concentré. En mots et en images…