Histoire de théâtre national

C’était en 2005. Trois comédiens – Soumette, Faissoil, Mounir – lançaient le projet d’un Théâtre National des Comores. Une belle ambition dans une histoire du théâtre comorien, qui demande encore à être écrite, depuis les années coloniales, jusqu’aux expérience les plus récentes. L’article est paru dans le Kashkazi de septembre 2005[1].

Devenir un pôle d’attraction artistique national et international. C’est l’objectif du Théâtre National des Comores, fondé en juin par trois jeunes comédiens. Le baptême de la troupe a eu lieu le 2 juillet au Palais du peuple de Moroni, où Mounir Hamada Hamza, Soumette Ahmed Said Ali, Sultan Faissoil, rejoints par Abdallah Mohamed Abdou, ont joué la pièce Qui sommes-nous ? pourle 30ème anniversaire de l’Indépendance.

Une entrée en matière qui correspond à leur volonté : donner au théâtre comorien une structure de référence, un espace de travail et d’échanges au niveau national. « Il ne faut plus qu’on soit là, à attendre qu’on nous appelle et qu’on nous donne un cachet pour telle ou telle manifestation », explique Soumette Ahmed. « Et que les gens s’adressent à telle personne parce qu’ils la connaissent, ou bien à l’Alliance franco-comorienne. Il faut monter un répertoire, proposer quelque chose d’organisé ».

Sultan Faissoil, Soumette Ahmed, Mounir Hamada Hamza, fondateurs du projet de théâtre national, lors du festival O Mshezo de l’Université des Comores à l’Alliance de Moroni en mai 2008.

Pour les fondateurs du projet, basés tous les trois à Moroni et flanqués d’un technicien, la première étape consiste à recruter de « bons éléments » sur chacune des îles. Une semaine de stage sera ainsi animée par Soumette Ahmed et Sultan Faissoil, du 23 au 29 septembre, à l’Alliance Franco-Comorienne de Mutsamudu (Ndzuani). Dix participants auront été sélectionnés auparavant par l’Alliance parmi les troupes de l’île. A l’issue de la formation, l’un d’entre eux sera retenu pour faire partie de la troupe nationale. La même opération devrait être organisée plus tard à Mwali.

« Ce stage de formation est atypique et procède d’avantage de l’échange, du partage et de l’écoute entre les artistes des îles », souligne Soumette Ahmed. « Il va permettre aux comédiens d’avoir un même clin d’œil pour les années à venir. Ainsi naîtront des relations théâtrales entre les différentes îles des Comores. » La formation sera axée sur l’exploration du corps, le travail sur les marionnettes, l’improvisation, la jonglerie et les mouvements chorégraphiques.

« J’ai eu la chance de suivre une formation d’un mois à Madagascar et je veux partager ce que j’ai appris » indique le comédien, qui a également participé à des stages au Centre Dramatique de l’Océan Indien, à la Réunion. « Quand je me suis rendu à Anjouan pour préparer nos représentations là-bas, j’ai participé aux répétitions de trois troupes différentes. Je me suis aperçu qu’ils ont besoin de nous pour faire évoluer notamment le travail du son et les mouvements sur scène. Il faut privilégier les rencontres pour avancer ».

Dans le spectacle Qui sommes-nous ? à l’Alliance de Moroni en avril 2008.

La pièce Qui sommes-nous ? sera jouée à Moroni le 21 septembre pour financer une partie des frais de la formation. Soumette Ahmed, qui a choisi de faire des études d’informatique à l’Université « parce que j’étais convaincu que ça peut servir dans le théâtre », essaie de lancer la machine avec les moyens du bord. « J’ai pu faire le logo, m’occuper de la communication… ça diminue les charges », explique-t-il. Outre la participation de l’Alliance – principal soutien du théâtre comorien – la troupe a reçu une aide du Commissariat national à la jeunesse, chargé des questions relatives à la culture.

Pour qu’elle n’ait pas de « national » que le nom, il reste cependant à formaliser les conditions du soutien de l’Etat à la structure. « Ils nous ont dit qu’ils étaient d’accord sur le principe, mais qu’ils ne savent pas comment ça se passe », affirme le comédien. « Il faut qu’on se renseigne sur le statut des troupes nationales, et un décret doit être publié. Ils ne nous prendront pas en charge entièrement mais nous devons signer une convention. » Un travail de pionniers, indispensable selon Soumette pour « donner une valeur au théâtre ». « C’est important si on veut faire quelque chose de bon, qui puisse être présenté à l’extérieur du pays ».

Lisa Giachino


En Une, Qui sommes-nous ? à l’Alliance de Moroni en avril 2008.

[1] 15 septembre 2005.