Une chronique des inya dans l’Itsandra. La ville d’Itsandra-Mdjini fut fondée par les Nkotso, les Mwepva et les Mwanguwu, mais les premiers sont toujours considérés comme les fondateurs de la ville. Ils se seraient installés originellement dans les lieux suivants : Kurantsini, Bambani et Buntsini. Mais peut-être faut-il préciser que plusieurs des inya fondateurs de la ville n’ont pas laissé de traces.
Sur un plan hiérarchique, les inya de Sankule Al Anrabia – l’autre petit nom de la ville d’Itsandra-Mdjini – se divisent en six branches. En premier lieu arrive l’inya Mhu Wa Mbwa wa Irudidju. L’un des clans les plus importants du Befuni, paradoxalement le moins connu. On n’en connaît pas l’origine, effectivement. On ne lui connaît de branche descendante, non plus. Suivent ensuite l’inya Mhu wa Mbwa wa Hantsambu et l’inya Femlarusi. Le premier viendrait du Mbadjini, bien que certains continuent à évoquer le village de Hantsambu, où se trouvent bon nombre de ses membres. Ils ont principalement construit à Mapvingudju, en arrivant à Itsandra. Le second clan survit jusqu’à nos jours. Il aurait ses racines dans le Dimani, avec des prolongements à Fumbudzivuni et à Idjikundzi. Il se serait établi dans un lieu du nom de « Bora ».
On parle souvent de l’inya Mdrwabedja et de l’inya Mwinyi Mdji. Le premier clan n’est pas vraiment connu dans l’Itsandra. On ne lui connaît aucune descendance dans la ville. Mais on pense qu’il tiendrait ses origines de Batsa, avec une sous-branche à Ntsudjini. Le second, quant à lui, serait lié à Moroni et se serait installé originellement à Mawesha. On parle aussi de l’inya Mwankodo, qui se subdivise en trois sous-clans :l’inya Mwankodo wa Gulamanyo, l’inya Mwankodo wa Mtsambudju et l’inya Mwankodo wa Magobani.Ce clan en question viendrait de la région du Hamahamet. Avec des origines remontant à Shiraz. Ses ancêtres seraient des shiraziens d’origine, qui auraient fait naufrage et se seraient réfugiés dans une grotte, au lieu-dit « Djoma La Hawanga ». L’inya Mwankodo descend du clan des Fwambaya. Ce dernier ramène aux régions suivantes : Hamahamet, Washili, Dimani et Itsandra. Il a donné naissance à plusieurs sous-clans tels que Hele Bantse, Mwankodo, etc.

Au lieu-dit Buntsini.
On pense que ce clan apparaît dans l’Itsandra aux environs du 14ème siècle, après la mort de Djumwamba Pirusa, premier sultan d’Itsandra. Mwankodo est le nom de la nièce de ce sultan, fille de Wabedja, sa sœur. Ce clan est l’un des plus importants depuis l’époque du sultanat. Il avait le monopole du vizirat de l’Itsandra, jusqu’à la fin du régime féodal à Ngazidja. D’autres clans sont à citer. L’inya Walimu Ilezo, qui viendrait du Hamahamet, aurait construit à Simadjuu, un endroit qui se trouve dans le quartier Shongodju. Ce clan aurait une branche à Itsandzeni, Ntsudjini et Kwambani. Le dernier sultan issu de cet inya serait le roi du Washili, connu sous le nom de Mfawume wa Madjuwani. L’Inya Djombo Djanga aurait ses racines à Iconi et se serait également installé à Mawesha. Il aurait des prolongements dans le Mbude et le Mbadani dans l’Itsandra. L’inya Mlimantsini, lui, n’a laissé aucun descendant dans son histoire.
L’inya Bandamadji est l’un des inya les plus estimés à Itsandra. Il serait venu de Bandamadji dans le Domba, se serait fixé à Dari Shumbeni. Il connaîtrait des embranchements à Bandamadji dans l’Itsandra et à Tsidje. L’inya Karatasi serait issu de la région du Mbwanku. Il se serait installé à Kundju. C’est à ce clan qu’appartenait Mkufundi Fesiliyamini, sorcier, astrologue réputé à son époque. L’inya Zirumbeni aurait pour sa part ses origines dans la région du Mbude, plus particulièrement à Ntsaweni. Il serait établi au lieu-dit Kurantsini. Ce clan est très respecté dans la ville. La plupart des instruits en matière de religion venaient de ce clan. Entre autres choses, il avait le monopole du hutuba. Aujourd’hui, il a perdu ce privilège. Le prêche revient à plus instruit, capable de mener le sermon du vendredi. L’inya Mdombozi, très limité dans son histoire, ne compte plus beaucoup de personnes. C’est pourtant un clan royal, qui aurait ses origines à Fumbuni. Il serait venu s’installer dans l’Itsandra après l’assassinat du roi Dari Wa Ntibe.
L’inya Mva Nayi[1] est un petit nom attribué à ceux de l’inya Mawazir, dont l’origine remonte à Ntsaweni. Il se serait installé vers Shioni. L’inya Bandani est plus connu sous le nom d’inya Mba. Il viendrait de Dzahani. La tradition orale ne donne pas assez d’informations sur ce clan. En tout cas, il est l’un des plus importants de la ville, parce qu’il fait partie des six premiers clans, occupant le premier rang de la hiérarchie sociale. Ce clan est parmi les plus importants d’Itsandra-Mdjini. Il serait issu d’une famille royale, dont l’ancêtre fut Fedezi wa Dezi. Il viendrait du monde arabe. L’inya Fedezi d’Itsandra-Mdjini viendrait d’Iconi. Il aurait construit sa maison originelle à Nyandoni. Les inya ne sont pas une tradition récente. Mais la tradition orale hésite à nommer l’époque où cette institution féodale a pris forme. Les uns disent que la hiérarchie des inya remonterait aux temps des Bedja, les autres pensent qu’elle apparaît plutôt au temps des Mafe. Au temps des chefferies familiales, lors des prises de décision les plus importantes.

Mawesha.
Cette hiérarchie des clans est indissociable de la société traditionnelle comorienne, dont Itsandra-Mdjini a gardé trace dans son fonctionnement. Il y a eu pas mal de changements, cependant, ces dernières années. Chaque quartier d’Itsandra-Mdjini, parmi les trois principaux existants, possède sa propre hiérarchie du monde des inya. Harimwa Mdji compte ainsi 12 inya dans sa pyramide des clans. Le premier rang est occupé par le clan Fedezi, suivi par ordre respectif, de Mwankodo wa Gulamanyo, de Mwalimu Ilezo, de Mwankodo wa Mtsambudju, de Bandani, de Bandamadji, de Magobani, de Mlimantsini, de Zirumbeni, de Karatasi, de Mwinyi Mdji, et de Djombo Djanga. Un clan plus ancien de la ville se trouve dans ce quartier : l’inya Femlarusi. Mais il n’appartient pas à cette pyramide des 12. Pourtant, il fut parmi les premiers à peupler l’endroit.
D’après la tradition, les fondateurs d’un village n’avaient pas le choix : les derniers venus devenaient les plus importants. Cette pratique n’est cependant pas reconnue par tous, à l’exception des sept premiers clans, qui conservent toujours leur rang social. Les cinq autres clans – Zirumbeni, Karatasi, Mwinyi Mdji et Djombo Djanga -n’y ont pas une place fixe, par exemple. On la donne au clan, reconnu comme le plus remarquable, dans ses faits et gestes. Dans le quartier Befuni, on rencontre cinq clans. Mais la hiérarchie ne s’y applique pas comme à l’ancienne. Auparavant, la première place revenait à l’inya Nkotso. La deuxième était réservée au clan Mhu wa Mbwa wa Irudidju, suivi par l’inya Mhu wambwa wa Hantsambu, ainsi que par l’Inya Mtsamdu. Au fur et à mesure que les années passent, les choses changent. La hiérarchie inter clanique disparaît peu à peu, suite notamment à la création de nouveaux groupes, liés au « mdji ». Chaque « mdji » désigné attribue le premier rang au clan qu’il choisit. Ce qui change des habitudes établies par le passé.
Housni Kassim
Photo à la Une : Bandani. La façade de la maison où a grandi Al-Habib Bin Soumeït. Toues les illustrations de cet article viennet de Housni Kassim.
[1] Litt. « mal-habillé ».